Tarja Turunen a déjà fait ses preuves au sein de Nightwish, en tant que membre fondateur du groupe. Après son éviction, elle a poursuivi sa carrière solo, mais je n'ai jamais eu la curiosité d'écouter ses précédentes œuvres, à l'exception bien sûr de quelques uns de ses morceaux phares (Falling Awake, Die Alive, I Walk Alone ...). Je l'ai même vue en concert en 2010, mais elle n'a pas réussi à m'impressionner au point que je suive sa carrière avec davantage d'attention. Je ne pourrai donc certainement pas décrire l'évolution de ses albums, depuis My Winterstorm, en passant par What Lies Beneath, ni même son fameux Act I.
La sortie de l'album coïncidant plus ou moins avec mon anniversaire, j'ai voulu m'offrir un CD et, n'ayant aucune envie particulière, je me suis laissée tenter par ce magnifique objet, optant d'ailleurs pour la version spéciale, avec une cover dure sous forme de livret, contenue dans une sorte de pochette en plastique amovible (vous pouvez voir une photo du résultat ici). Le rendu est absolument sublime : l'artwork très coloré est tout à fait dans l'esprit de la thématique (et de la musique, d'ailleurs) de l'album, les petits effets 3D au verso et les formes géométriques ont fini par m'achever. On ne boude d'ailleurs pas son plaisir en ouvrant l'intérieur. Par contre, le contenu du CD est-il à la hauteur de cet emballage si soigné ?

Dans un premier temps, je passerai en revue chacune des chansons, pour ensuite m'intéresser à l'ensemble de l'album. Comme d'habitude, j'ai pris mon temps pour bien l'écouter au moins une dizaine de fois avant d'en tirer des conclusions, mais mon avis ne tient tout de même qu'à moi, le vôtre sera peut-être différent. (Vous devez commencer à connaître un peu mes goûts, d'ailleurs :p).
Colours In The Dark commence donc sur Victim Of Ritual, le premier single tiré de l'album. Ce format lui va parfaitement d'ailleurs, puisqu'il annonce très bien la couleur de l'album. On sent que Tarja a voulu expérimenter de nouveaux éléments, ne pas rester dans une toile plate passe-partout et sans saveur ni originalité. Le début part sur une intro de Ravel (Bolero) et le refrain continue à intriguer, l'accent de Tarja devenant plus théâtral, ce qui peut agacer au premier abord. A l'instar de l'album entier, il s'agit d'une chanson qui demande réellement plus d'une dizaine d'écoutes pour être au mieux appréciée et pour y dénicher chaque petit élément très intéressant. Notamment, les passages a cappella permettent une certaine proximité avec l'auditeur, assez rare chez Tarja qui a pour habitude de rester distante, selon moi. J'ai noté également la forte importance de la symphonie, avec des petites mélodies arabisantes qui font leur effet. Le break, quant à lui, s'aventure sur un terrain différent, plus progressif. En bref, un morceau mémorable, très diversifié à lui-même et réussi à mon goût.
J'ai ensuite été un peu déçue par 500 Letters, un peu plus banale, qui ralentit tout de suite les ardeurs. Le principal point qui m'a gênée dans l'album est amorcé ici, avec une batterie et des guitares qui font un peu "too much" par moments, ne collant pas à la structure assez simple de la chanson. D'un autre côté, j'ai davantage eu le temps d'apprécier la chant de Tarja, magnifique au possible.
Lucid Dreamer remonte un peu la pente. Le refrain est plutôt efficace, la voix de Tarja faisant à nouveau des merveilles. Durant le break très théâtral, vieillot, un peu effrayant (un bébé, des chuchotements ...), je n'ai pas pu m'empêcher de penser à Scaretale, de Nightwish. Je sais que j'y pense assez souvent, mais il faut avouer certaines similarités avec le dernier album de mon groupe chouchou, entre le côté théâtral et le côté diversifié. L'orchestre est assez épique et, au final, j'ai bien apprécié cette chanson.
C'est avec Never Enough que mon intérêt a baissé. Déjà, niveau titre de chanson, ça me rappelle Never Enough de Epica et Not Enough de Delain, ce qui ne m'a pas du tout donné envie d'en voir plus xD Mais bon, les similarités s'arrêtent là. On sent immédiatement que Tarja a voulu mettre le paquet ici niveau heavy metal. Entre les guitares très bourrines au début et la batterie prononcée sur le refrain et le break, je ne savais plus où mener de la tête. Le final très "méchant" est d'ailleurs semblable à celui de Dead Gardens (désolée, je n'y reviendrai plus, promis :p !), on se demande "quand cela va se finir". Finalement, l'originalité n'y est pas non plus, j'ai assez de mal avec cette nouvelle tendance progressive/alternative, qui me rappelle son ancien Falling Awake également. En live, on doit bien se défouler mais, chez soi, ça ne m'apporte pas grand chose malheureusement.
Heureusement, on ne s'attarde pas là-dessus, pour passer à Mystique Voyage, qui porte bien son nom. Rien que pour le principe d'avoir chanté en quatre langues différentes, je suis conquise. C'est une belle réussite, j'ai été emportée par ce voyage, mystique d'ailleurs, comme la musique. La symphonie est vraiment bien menée, magnifique ... épique ! Le piano apporte enfin cette touche de douceur fort attendue, le pré-refrain (comment appelle-t-on ce moment ? :p) chanté par Tarja est un pur délice de quelques secondes seulement, mais qui m'a fort marquée - trop parfait ! Ça m'a vraiment laissé l'impression d'une histoire contée par Tarja qui, je pense, finit au sommet de mon classement. Une merveille !
Par contre, la suite m'a à nouveau plutôt déçue. Darkness est la cover de l'album, originellement chantée par Peter Gabriel. Je ne connaissais pas du tout la chanson, alors je me contenterai de juger la version de Tarja sans comparer, même si j'avoue au final avoir une petite préférence pour l'original, surtout sur les couplets doux, qui en font une pseudo-ballade. La voix masculine est moins puissante que celle de Tarja et correspond à mon goût davantage à la mélodie. D'un autre côté, on mêle également des éléments électroniques, comme le refrain dont l'effet "ordinateur" sur la belle voix de Tarja ne m'a pas du tout convaincue, à un son presque "grunge" sur le refrain, mais qui m'a fait plus penser à Nirvana qu'à Alice In Chains (je n'apprécie pas trop le premier, j'aime le second ...).
Tout comme les chansons, j'enchaîne sur la suite, un peu plus intéressante à mon goût : Deliverance. Je commence à comprendre où est la force de Tarja. On le savait tous, il s'agit de sa voix, plus que divine encore une fois, mais j'ai noté une amélioration au niveau de la transmission d'émotions, très importante pour moi. Non seulement, sa voix revient, le temps d'un court instant, sur son chant pré-Once, mais elle apporte cette petite variation dans la voix qui nous fait ressentir des choses. Un morceau assez sympathique donc, grâce à l'abandon de l'envie de faire "heavy", pour faire plus "beau". L'orchestre en est un parfait exemple, également à son comble dans cette chanson.
Mais toutes les belles choses ont une fin, pour continuer suivant le schéma où une chanson bien est suivie d'une chanson moins bien (littéralement). Neverlight commence à fond façon Alice In Chains. Les guitares "griffantes" dès le début et la batterie intense tout au long des couplets sont de retour depuis Never Enough. On essaie également d'y planter une partie symphonique, jolie certes, mais qui ne s'agence pas tout à fait avec la puissance de la batterie. Pourtant, je suis la première à adhérer au concept même de "métal symphonique", mais j'ai un soucis avec ces forts battements qui arrivent comme "en trop", me laissant un sentiment plutôt brouillon. Au lieu de mêler joliment les deux, métal et symphonie, les deux se succèdent sans réelle fusion.
La prochaine ballade est réellement l'unique de l'album, bien placée pour nous reposer un peu l'esprit. Until Silence m'a vite fait penser à l'artwork de l'album, simple, jolie, mais touchante dans son genre, digne des belles ballades nightwishiennes :p Elle n'essaie pas d'en faire trop non plus, à mon plus grand bonheur. Je pourrais certainement fondre en larmes en concert durant cette chanson.
L'ultime morceau de l'album, Medusa, se trouve bien à sa place, étant assez mémorable également. Immédiatement, l'introduction m'a rappelé la bande-originale de La Passion du Christ, une de mes préférées, avec la même ambiance sublime, mais lourde et triste. On se promène dans une atmosphère un peu plus sombre que sur le reste de l'album, la voix de Tarja m'a fait l'effet d'une "lumière" venant alléger ce climat. Les premiers coups de batteries retentissent d'ailleurs de manière assez surprenante, si on est à fond dedans. Le côté heavy est plus maîtrisé à mon goût, abandonnant le son grunge pour un son un chouïa plus doom, moins bourrin. De plus, un homme chante en duo avec Tarja, deux voix qui se marient très bien, ainsi que des chœurs sublimes viennent rappeler le titre de la chanson, ressemblant à des petites méduses - ou en tous cas à la voix que je les imaginerais posséder.
En plus du contenu de l'album, un code se trouvait dans la pochette, permettant le téléchargement d'une chanson bonus, Into The Sun. J'ai bien apprécié cette ballade très mignonne et touchante.
Je n'ai pas consulté les paroles des différentes chansons, mais rien que la musique dégage à mon goût cette thématique de Colours In The Dark : l'obscurité - le noir - absorbe toutes les couleurs en elle. Tarja a certainement voulu se démarquer grâce à cet album, créer son propre style, sa manière de s'exprimer, expérimentant ainsi de nouvelles structures très complexes, surtout au niveau de l'instrumentation. Il faut également lui reconnaître son originalité et ses efforts pour introduire plusieurs éléments nouveaux. Cependant, si les morceaux plus "doux" mettant en valeur l'orchestre sont plutôt efficaces, sans être extraordinaires, les passages plus heavy semblent trop superficiels et m'ont laissé une sensation un peu chaotique dans l'esprit. De plus, il n'y a pas de réelle cohésion entre "métal" et "symphonie", pas de fil conducteur permettant de suivre attentivement et d'en dégager ce petit quelque chose qui nous fait grandir en écoutant un nouvel album. La voix de Tarja est fidèle à elle-même, continuant son évolution vers un registre plus "rock" que lyrique et la même distance que d'habitude est la plupart du temps placée entre l'auditeur et les chansons, au point que je ne peux pas m'immerger totalement dans cet univers. C'est dommage ...
En conclusion, même si l'atout de Tarja, sa voix, lui permettra toujours de s'en tirer avec brio, je ne suis définitivement pas adepte de son style d'écriture. Je suis certaine que ses fans se régaleront plus que jamais en l'écoutant mais, à moi, il m'a fallu une bonne dizaine d'écoutes pour sélectionner les trois ou quatre chansons à retenir et que j'écouterai avec grand plaisir. Il me manque toujours cette étincelle, qui n'arrivera jamais, je le crains. Je vous conseille tout de même de laisser sa chance à Tarja en écoutant l'album plus d'une fois, pour pleinement le comprendre et juger par vous-même si vous êtes séduits.